REFUSER LA DÉMAGOGIE
- CFDT Syndicalisme Hebdo
- 2 mars 2019
- 7 min de lecture

La CFDT répond aux idées reçues et autres fake news sur l'Assurance Chômage et les demandeurs d'emploi.

Le Gouvernement a annoncé, en juillet 2018, une nouvelle réforme de l'assurance chômage. Alors que la négociation entre organisations syndicales et patronales a échoué le 20 février 2019, le gouvernement entend reprendre la main pour la définition des règles d'indemnisation.
Pour la CFDT, les demandeurs d'emploi ne doivent pas être les grands perdants d'une réforme qui serait guidée par la seule recherche d'économies budgétaires. Lors de la concertation qui s'ouvre la CFDT continuera plus que jamais de défendre les demandeurs d'emploi avec un bon niveau d'indemnisation et un accompagnement de qualité.
A l'occasion de cette réforme, les discours ou slogans à l'emporte-pièce stigmatisant les demandeurs d'emploi rejaillissent. Ces derniers sont pourtant confrontés à une grande précarité. Pour la CFDT, les chômeurs sont des personnes involontairement privés de leur emploi.
Ils ne choisissent ni d'être au chômage, ni d'y rester longtemps !
Photographie de la situation réelle de ces femmes et hommes.

LES DEMANDEURS D’EMPLOI GAGNENT TRÈS BIEN LEUR VIE AU CHÔMAGE !
Tous les demandeurs d’emploi ne touchent pas d’allocation chômage : ils ne sont qu’un sur deux sur les 6,2 millions de demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi. Et quand ils touchent une allocation, celle-ci s’élève en moyenne à 1 020 € nets par mois. Ce montant se situe au niveau du seuil de pauvreté qui s’élève à 1 015 € pour une personne seule. Les allocataires sont donc loin d’être des privilégiés : leur allocation correspond à un pourcentage du salaire qu’ils touchaient dans leur emploi précédent.

LE CUMUL EMPLOI/CHÔMAGE CONSTITUE UN
SOUTIEN AUX PLUS PRÉCAIRES.
Le cumul emploi/chômage existe depuis longtemps : il permet aux demandeurs d’emploi de rester proches de l’emploi, de conserver une employabilité et surtout de prévenir le chômage de longue durée et l’isolement. Les règles de cumul sont ainsi faites qu’un chômeur aura toujours intérêt à reprendre un emploi : il gagnera toujours plus qu’en ne touchant que sa seule allocation. Le cumul concerne des personnes qui occupent des emplois précaires, par nécessité et non par choix : 90 % des embauches sont en Contrat à durée déterminée (CDD) ou en intérim. La plupart durent moins d’une semaine. Le gouvernement a ciblé la révision des règles et les économies sur ce dispositif de cumul : les précaires seront les premiers impactés.
Dans la réforme en cours, la CFDT s’opposera à ce que les économies se fassent sur le dos des plus précaires.

QUAND ON EST AU CHÔMAGE, TOUTES LES OFFRES D’EMPLOI SONT BONNES À PRENDRE.
Toutes les offres d’emploi ne sont malheureusement pas des postes en Contrat à durée indéterminée (CDI) correctement rémunérés et situés à quelques kilomètres de chez soi. La réalité est toute autre. La plupart des emplois proposés sont peu qualifiés, précaires, de très courte durée et souvent en horaires atypiques. Ils s’exercent dans des conditions difficiles et sont peu attractifs. De leur côté, les demandeurs d’emploi font face à de nombreuses contraintes : un véhicule en mauvais état, un accès limité ou inexistant aux transports en commun, des enfants à garder en urgence en l’absence de solidarité familiale… Doit-on exiger des chômeurs qu’ils acceptent de telles offres, éloignées de leur domicile, de courtes durées et très faiblement rémunérées ?

LES CHÔMEURS SONT DES PROFITEURS ET DES FAINÉANTS.
Parmi les chômeurs indemnisés, 53 % travaillent chaque mois, souvent en CDD ou en intérim. Ils « bossent » et pour eux le chômage n’est ni un calcul ni un plan de carrière !
Par ailleurs, quatre demandeurs d’emploi sur dix ne connaissent pas les règles d’indemnisation et trois sur dix ne savent pas qu’exercer une activité en période de chômage, même réduite, leur permet de reporter leur fin de droits : comment imaginer qu’ils puissent élaborer une stratégie pour rester sans emploi ?

POUR RÉDUIRE LE NOMBRE DE CONTRATS COURTS, IL SUFFIT DE FAIRE PAYER LES PATRONS.
Faire payer les employeurs ne suffit pas : ils paient une sur-cotisation sur les contrats courts (Contrat à durée déterminée d’usage - CDDU) et s’acquittent de la prime de fin de CDD. Le nombre de CDD ou de contrats en intérim ne diminue pas pour autant. Pire, certains secteurs d’activité organisent même leur « business model » autour de ces contrats, notamment dans l’hébergement et la restauration, l’hébergement médico-social (Ehpad) et les activités spécialisées scientifiques et techniques (instituts de sondage). La situation demeure inquiétante : 80 % des embauches se font en CDD, souvent inférieurs à un mois et un quart des contrats CDD ou en intérim sont de moins d’un jour. Pour la CFDT, une réflexion par branche était nécessaire pour lutter contre l’utilisation abusive de ces contrats, ce qui aurait dû leur permettre de s’interroger sur l’organisation du travail. Seulement, l’investissement patronal n’a pas été au rendez-vous. Face à cette mauvaise volonté, taxer les employeurs est la première des solutions possibles : la CFDT soutient la mise en place d’un dispositif bonus-malus. Reste à savoir si le gouvernement l’imposera à tous les employeurs…

LES CADRES COÛTENT TROP CHER AU RÉGIME ! LA DÉGRESSIVITÉ EST LA SOLUTION.
Il n’y a pas de statut cadre dans le régime de l’assurance-chômage. Il s’agit d’un régime assurantiel qui garantit à tous les salariés, quel que soit leur statut, un revenu de remplacement de bon niveau, fonction de leur salaire antérieur quand ils perdent leur emploi. Les hauts salaires demandeurs d’emploi ne doivent pas être stigmatisés. Ils participent, comme tout le monde, au financement du régime et sont peu nombreux à toucher une allocation : seuls 5 % des chômeurs touchent plus de 1 810 € net par mois,
et
0,05 % (soit 900 personnes) perçoivent aujourd’hui l’allocation

maximale de 6 615 € net par mois.
Les personnes qui restent le plus longtemps au chômage sont celles qui doivent être accompagnées, sécurisées financièrement, et non pénalisées par la dégressivité que le gouvernement évoque actuellement, de façon démagogique, comme une incitation à reprendre un emploi.
En vigueur entre 1992 et 2001, ce dispositif a montré qu’il était contre-productif. La dégressivité des allocations serait aussi pour le gouvernement le moyen de faire des économies, mais cela ne tient pas : les personnes concernées retrouvent un emploi bien avant la fin de leurs droits. Une éventuelle dégressivité de leur allocation après douze mois serait financièrement « inefficace ».
La CFDT s’oppose catégoriquement à cette mesure.

SI JE DÉMISSIONNE, J’AI DROIT À L’ASSURANCE CHÔMAGE.
C'est possible, mais pas automatique. Les règles de l’assurance-chômage permettent déjà d’indemniser des personnes qui démissionnent de leur emploi, sous certaines conditions : par exemple, pour créer une entreprise, suivre son conjoint, ou en cas de violence conjugale obligeant à déménager. Une personne démissionnaire qui, en dépit de ses démarches pour retrouver un emploi, reste au chômage plus de quatre mois, peut également demander à bénéficier d’une indemnisation. Les demandes sont examinées au cas par cas. Une nouvelle condition d’indemnisation a vu le jour : la démission pour un projet professionnel.
La CFDT a obtenu que l’allocation-chômage en cas de démission pour un projet professionnel réel et sérieux, validé par une commission paritaire, ne soit pas forfaitaire ou réduite : elle sera la même que celle des autres demandeurs d’emploi.
Attention, ce droit n’est pas encore effectif et ne le sera que courant 2019. La condition du projet professionnel a été voulue par la CFDT.
D’une part, cette nouvelle disposition ne devait pas inciter à la démission des personnes qui auraient eu du mal à retrouver un emploi et auraient risqué le chômage de longue durée.
D’autre part, elle ne devait pas non plus favoriser les personnes aux compétences recherchées sur le marché du travail. Celles-ci auraient pu profiter de l’assurance-chômage alors même qu’elles peuvent passer d’un emploi à un autre sans période de chômage. Pour les employeurs, permettre à tous de démissionner en touchant des indemnités chômage aurait permis « d’éviter » les ruptures conventionnelles. En limitant l’accès au chômage en cas de démission, la CFDT a aussi défendu ce dispositif qui permet déjà aux salariés de partir avec une indemnité (équivalente au minimum à celle du licenciement) et de bénéficier d’une allocation-chômage.

L’ASSURANCE-CHÔMAGE, C’EST AUSSI L’ASSURANCE D’ÊTRE ACCOMPAGNÉ.
Pour la CFDT, sécuriser les demandeurs d’emploi, c’est agir sur deux fronts : tout d’abord les sécuriser financièrement avec un bon niveau d’indemnisation et, ensuite, les accompagner en fonction de leurs besoins.
Cet accompagnement constitue un levier essentiel de la sécurisation des parcours professionnels des personnes en dehors de l’entreprise. Les demandeurs d’emploi peuvent être aidés par les conseillers de Pôle emploi, ceux des missions locales (s’ils ont moins de 26 ans), ceux de l’Apec (à partir d’un Bac+3) ou ceux de Cap emploi (pour les personnes en situation de handicap). Un accompagnement adapté permet à chacun d’identifier ses compétences, ses besoins en formation, de mieux connaître les qualifications demandées dans son secteur professionnel et sa zone géographique. La période de chômage n’est pas un temps d’inaction professionnelle : elle est utile pour rebondir. C’est avec un bon accompagnement qu’elle sera mise à profit pour retrouver un emploi stable et pour se projeter à nouveau dans une évolution professionnelle.

LA FORMATION, C’EST UN PLUS POUR ACCÉDER À UN EMPLOI DURABLE.
Les demandeurs d’emplois sont peu qualifiés : 56 % ont un niveau inférieur au bac. Les contrats qui s’offrent à eux sont principalement à durée déterminée, les entreprises organisant la flexibilité autour d’emplois non qualifiés. Ils subissent en quelque sorte une double peine : leur manque de qualification les oblige à enchaîner des petits contrats dont la courte durée les empêche de se former en entreprise, ce qui les maintient dans la précarité. Pour rompre ce cercle infernal, il est essentiel d’investir dans la formation des demandeurs d’emplois. La période de chômage, allongée grâce aux droits rechargeables, peut être une opportunité pour se former.
Pour autant, il faut veiller à ce que l’assurance chômage ne « libère » pas les employeurs de leur devoir de formation. Pour la CFDT, les mises en situation de travail sont aussi des temps où les demandeurs d’emploi se forment.

L’ASSURANCE-CHÔMAGE EN FRANCE EST TROP GÉNÉREUSE
L’assurance-chômage n’est pas plus généreuse en France que dans d’autres pays européens (l’Allemagne, par exemple), dès lors que l’on compare la combinaison de l’ensemble des droits de la protection sociale et des garanties des personnes, aides au logement et minima sociaux notamment.
Le montant moyen de l’indemnisation est de 1 020 € par mois :
Issu de ses cotisations, fruits du travail du salarié, il ne s’agit pas de générosité mais de nécessité pour un pays. L’assurance-chômage est en effet indispensable pour les salariés, les chômeurs, les entreprises et l’ensemble du pays : elle répond au risque de perte d’emploi, garantit un accompagnement et maintient le pouvoir d’achat des personnes au chômage. C’est un amortisseur social.

SI L’ÉTAT REPREND LA MAIN, IL VA BEAUCOUP BAISSER LES DROITS
L’État l’a annoncé dans la lettre de cadrage donnée aux partenaires sociaux en septembre : il estime que la dette de l’assurance chômage est trop élevée, qu’il faut la réduire plus rapidement en faisant trois à quatre milliards d’économies en trois ans. Pour répondre à ces objectifs, le gouvernement devra assumer une baisse drastique des droits ciblée sur les personnes cumulant emploi et chômage. Pour la CFDT, l’enjeu est d’abord celui de la création d’emplois de qualité !
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