1er novembre : la réalité de l'assurance chômage
- Anne-Sophie Balle (aballe@cfdt.fr)
- 31 oct. 2019
- 3 min de lecture
• Les premières mesures issues de la réforme de l’assurance-chômage (dont les conditions d’entrée, le rechargement des droits et la dégressivité des hauts revenus) s’appliquent au 1er novembre. • La baisse de droits va toucher 1,3 million de personnes, soit un chômeur indemnisé sur deux. • Syndicats et associations lancent une enquête auprès des demandeurs d’emploi pour donner à voir l’impact réel des mesures.

En détaillant les premières mesures de la réforme à quelques jours de leur entrée en vigueur sur France Inter, Muriel Pénicaud a veillé à ne pas aborder les sujets qui fâchent. « Les mesures qui arrivent là, il y en a trois », détaille ainsi la ministre du Travail. Elle évoque tour à tour « la capacité de démissionner pour se reconvertir, faire un projet professionnel […] les indépendants, agriculteurs, artisans et commerçants, qui auront un filet de sécurité », faisant ici référence à l’allocation forfaitaire (800 euros par mois pendant six mois) à laquelle les indépendants pourront prétendre en cas de liquidation judiciaire. Si la ministre insiste sur ces deux points, c’est qu’il s’agit de la traduction de deux promesses de campagne d’Emmanuel Macron. Mais, dans les faits, ces mesures ne devraient concerner que 70 000 personnes par an (chiffres Unédic), pour un coût assez faible en comparaison des économies attendues par la réforme dans son ensemble (3,4 milliards d’euros d’ici à la fin 2021).
Une réforme injuste

« La troisième chose, ce sont les conditions d’entrée à l’assurance-chômage, qui se modifient » du fait, selon la ministre, d’« un marché de l’emploi dynamique » et la nécessité d’avoir « un système incitatif à retrouver un emploi quand il y en a ». Or c’est là que se trouve l’une des principales injustices de la réforme de l’assurance-chômage. Désormais, il faudra avoir travaillé six mois au cours des vingt-quatre derniers mois pour être indemnisé, contre quatre mois sur vingt-huit jusqu’à présent. Certains demandeurs d’emploi n’auront tout simplement plus droit à des allocations, d’autres seront indemnisés plus tard qu’aujourd’hui. Ce sera notamment le cas pour les plus jeunes, les moins de 25 ans, étudiants ou saisonniers. Ils seront 210 000 concernés dès la première année de mise en œuvre de la réforme. Enfin, en un an, 300 000 demandeurs d’emploi verront se réduire la durée de leurs droits, une baisse supérieure à un mois dans près d’un cas sur deux.
Au total, 710 000 seront concernés par ce seul changement de règle au cours de la première année de mise en œuvre, et les droits rechargeables seront les premières victimes collatérales. Car c’est l’un des oublis de la ministre : cette mesure obtenue par la CFDT en 2014 (qui permettait de prolonger ses droits en cas de reprise d’activité) a été vidée de sa substance. Là où il fallait avoir retravaillé un mois pour recharger ses droits, il en faudra désormais… six !
Le droit de suite de la CFDT
« On tape sur les plus précaires, les jeunes et tous ceux qui ont le plus de mal à retrouver un emploi stable », s’irrite la CFDT, qui a décidé de faire valoir son droit de suite auprès des parlementaires* comme auprès des demandeurs d’emploi (lire l’encadré). « Le gouvernement a décidé de nouvelles règles sans transparence, en ne publiant pas d’étude d’impact : il doit maintenant assumer ces baisses de droits drastiques. » Bien que moins nombreux, ceux dont la rémunération brute atteint 4 500 euros se verront appliquer à partir du 1er novembre une dégressivité de 30 % de leur allocation à partir du septième mois d’indemnisation, seuls les allocataires de 57 ans et plus étant épargnés. Au total, 40 000 personnes devraient être concernées. « Jamais une réforme d’une telle ampleur n’avait été envisagée. Pour tenir son objectif de ramener le taux de chômage à 7 % en 2022, le gouvernement semble prêt à tout, estime la CFDT. Y compris à faire basculer un nombre non négligeable de demandeurs d’emploi dans la solidarité nationale. » Une manœuvre sans risque pour le gouvernement : tous les regards sont aujourd’hui braqués sur l’emploi. Le taux de précarité de la population française lui, reste sous les radars.
* Le 11 octobre, la CFDT interpellait les parlementaires sur les conséquences désastreuses de la réforme.
Posts récents
Voir toutSaisie par plusieurs syndicats, dont la CFDT, qui contestaient la réforme de l’assurance-chômage, la juge des référés du Conseil d'État...
L’audience aura duré trois heures. Trois heures durant lesquelles les représentants du ministère du Travail ont fait face aux questions...
Comments